Écrire est un mystère

Quand j’écris, je n’ai d’autre but que d’écrire. Le point de départ est une impulsion, un désir, le désir d’écrire sans savoir qui —ou quoi— va arriver sous ma plume. Je ne cherche pas à amener la lectrice, le lecteur, à réfléchir à tel thème et encore moins à lui apprendre ceci ou cela. Il y a des chances que les lecteurs en sachent plus que moi sur à peu près tout. J’écris de la fiction. Pas un essai. Pas une démonstration. Pas une thèse. Pas un pamphlet. Seulement de la fiction. Ce sont souvent les personnages qui se présentent d’abord et je découvre les thématiques et les décors en cours d’écriture. Je vis longtemps avec les personnages et ils me racontent l’histoire. Je fais des plans, nombreux et divers, non pour juguler le récit mais pour explorer toutes les possibilités, pour baliser les territoires où l’écriture va jouer librement et donc les déborder. J’espère le débordement, le moment où je serai surprise par des événements ou des personnages imprévus. L’histoire, sans cesse, essaye d’échapper au cadre. Elle est plus libre, plus grande que le cadre. Plus libre et plus grande que moi. Heureusement, sinon on ne s’amuserait pas autant, elle et moi. Écrire est un but en soi. À vrai dire, « juste » écrire (et écrire juste) est le principal. J’étais enfant lorsque j’ai inventé et écrit une histoire pour la première fois. C’était un jeu, c’était simple : je pêchais les histoires qui flottaient dans ma tête et autour de moi. Si j’étais assez concentrée, assez détendue, assez curieuse, le filet ne revenait jamais vide. J’ai longtemps écrit sans même imaginer être lue. Un enfant joue pour lui-même, parce qu’il en a besoin, parce qu’il en a envie, parce que cela lui fait du bien, pas pour les autres. L’écriture est une nécessité et une évidence. Être lue est un espoir. En écrivant, je pense aux lectrices et aux lecteurs comme on pense au rivage lorsque l’on navigue. Il faut le quitter pour prendre la mer dans l’espoir de le retrouver. Mais, avant, il y a le voyage ! Le voyage, ses surprises et ses embûches, ses haltes, ses accélérations, ses hasards et ses merveilles. Il y a tant à faire : s’orienter, se concilier les vents, faire les bons gestes aux bons moments, trouver le flow et le conserver, accepter le calme plat et les tempêtes, ne pas renoncer, dormir, ne pas dormir. Traverser. Être traversée. Les Éveilleurs est un périple singulier. Depuis que les lectrices et les lecteurs ont embarqué avec moi, ils pagayent à mes côtés, goûtent le vent, hissent et réparent les voiles. J’ignorais que je serais partie si longtemps, qu’il y aurait tant d’aléas, de tourmentes. J’aurais pu renoncer cent fois à terminer d’écrire cette saga. Peut-être l’aurais-je fait s’il n’y avait les lecteurs. Peut-être me serais-je remise à la poésie, la poésie que personne ne lit. Mais, à chaque fois que cette idée me tentait, un mail ou un message arrivait, celui d’une lectrice qui demandait des nouvelles des Éveilleurs ou d’un lecteur qui découvrait le livre et m’en donnait. Une lectrice, un lecteur, suffit à nourrir le courage — ce mouvement du cœur. Ces livres-là sont adressés, ils ont des destinataires. Tant que les lectrices fidèles ou de parfaits inconnus m’écriront pour me parler de leur lecture, je continuerai à écrire Claris, Jad, Maya, Bahir, Blaise et tous les autres. Écrire est un mystère. Ce qui me meut c’est de pousser la porte, explorer les mystères. Les visiter et être visitée par eux. Et, parfois, les porter à la lumière pour les lâcher afin qu’ils aillent visiter d’autres personnes qui les interpréteront à leur guise, selon leur propre éclairage. Quand les lectrices et les lecteurs m’offrent le cadeau de leur lecture, les lumières s’additionnent. Tout s’illumine. De la magie pure. Personne ne contrôle la magie. On s’exerce, on y croit, on espère qu’elle se fera, on l’accueille quand elle arrive. C’est du taf, croyez-moi.
Newsletter #4

NEWSLETTER • Écrire comme on respire NEWSLETTER Écrire comme on respire Octobre 2024 Lectrices, Lecteurs ! Plonger dans le flow Des nouvelles des Éveilleurs Rencontres et Ateliers Les mots des lecteurs Plonger dans le flow Écrire est un mystère Quand j’écris, je n’ai d’autre but que d’écrire. Le point de départ est une impulsion, un désir, le désir d’écrire sans savoir qui —ou quoi— va arriver sous ma plume. Je ne cherche pas à amener la lectrice, le lecteur, à réfléchir à tel thème et encore moins à lui apprendre ceci ou cela. Il y a des chances que les lecteurs en sachent plus que moi sur à peu près tout. J’écris de la fiction. Pas un essai. Pas une démonstration. Pas une thèse. Pas un pamphlet. Seulement de la fiction. Ce sont souvent les personnages qui se présentent d’abord et je découvre les thématiques et les décors en cours d’écriture. Je vis longtemps avec les personnages et ils me racontent l’histoire. Lire la suite Des nouvelles des Éveilleurs Le manuscrit, « Le Nomadstère », est désormais dans d’autres mains que les miennes, de bonnes mains, enthousiastes et compétentes. Il va faire voile vers les éditeurs potentiels. Il n’y a plus grand-chose que je puisse faire par rapport à ça. Je n’ai guère de contrôle sur la suite du processus — éditeurs, commerciaux, libraires. Et certainement pas sur l’accueil que lui réserveront les lecteurs. Lâcher, attendre, faire confiance.Attendre n’est pas mon fort. Alors, je vais apprécier le bon état des filets, la qualité du vent, la vitesse des nuages et replonger dans le flow dès qu’il se présentera. Rencontres et ateliers Previous slide Next slide Salon. En octobre, a eu lieu le 3ème Salon du Livre accessible pour les Dys, à Ramonville, près de Toulouse. J’ai eu l’honneur d’être la marraine du Salon et la chance de faire un atelier d’écriture avec des enfants formidables qui prouvent, une fois de plus, que si on leur donne le temps dont ils ont besoin, si on les écoute, si on arrête de leur dire tout ce qu’ils ne font pas comme les autres, ils montreront tout ce qu’ils sont les seuls à pouvoir faire. Stage d’écriture. En octobre, j’ai piloté un stage d’écriture dans ma librairie préférée, Ombres Blanches, à Toulouse ! Pendant une semaine, j’ai embarqué dans les récits de douze ados (11-14 ans). C’était fabuleux ! Observer la confiance et la compréhension s’installer, les voir s’emparer et intégrer pistes et outils… Décidemment, OUI, l’écriture est un processus qui se partage ! Les mots des lecteurs L’échange avec les lectrices et les lecteurs est, pour moi, la plus belle surprise de ce métier. Des lectrices et des lecteurs m’ont fait l’amitié de lire Le Nomadstère en avant-première et de me faire part de leurs ressentis et réflexions. À lire leur lecture, je pense aux anges de Wim Wenders dans « Les ailes du désir ». Penchés vers ceux qui lisent, ils partagent, ils veillent. Merci. « Je te lis avec bonheur et avec faim. Alors que mon esprit est malade et vide en ce moment. Mais tu vois, je me prends souvent à recopier des phrases, à réfléchir à des concepts, à rentrer dans le jeu. On garde ces phrases, comme pour les protéger, parce qu’elles nous parlent, toujours. Dans toutes les situations. Chaque thème nous cueille pile quand on en a besoin, pile quand on le vit, pile quand on y pense même si c’est à l’arrière de notre tête. Merci de nous donner tout ça. Merci de ne jamais lâcher cette histoire qui fait sens. » J’aimerais savoir ce que vous pensez de cette newsletter. Écrivez-moi ! Inscrivez-vous ! Inscrivez-vous ! Si vous aimez cette Newsletter, partagez-la avec vos amis ! Que la plume vous soit légère et l’encre fluide !
Newsletter #3

NEWSLETTER • Écrire comme on respire NEWSLETTER Écrire comme on respire Août 2024 Dans ce numéro : La mort d’un personnage ; Retrouver le Brésil à la Réunion ; J’ai terminé le Nomadstère ! Lectrices, Lecteurs ! Plonger dans le flow Des nouvelles des Éveilleurs Les mots des lecteurs Ateliers d’écriture à la Réunion Plonger dans le flow La mort d’un personnage Écrire, pour moi, est intimement lié aux émotions.Les émotions des personnages.Celles qu’écrire provoquent en moi. Je ne ressens pas d’angoisse en écrivant. La seule étape de l’écriture qui peut m’angoisser est celle où je n’écris plus ou pas encore. Au cours du processus d’écriture, je peux éprouver de l’inspiration, de la surprise, de l’excitation, de la joie, de l’irritation, de la satisfaction, de l’impatience, des doutes. Je peux être perturbée, désorientée, perplexe, remuée. Des sensations passagères qui s’effeuillent au rythme du flow. Lire la suite Des nouvelles des Éveilleurs J’ai terminé « Le Nomadstère » !!! Je n’ose pas le crier trop fort parce vous allez me demander quand vous pourrez le lire. Et, à mon grand dam, je ne peux pas répondre. La prochaine étape est de trouver un éditeur.Nous y travaillons avec mon équipe et je vous tiendrai au courant de ce processus-là également. Cependant, je le répète ici : ce livre arrivera dans vos mains d’une façon ou d’une autre.En attendant, en septembre, je prends le chemin du prochain tome ! Ateliers d’écriture à la Réunion J’ai passé deux mois à la Réunion pour deux mois d’ateliers dans cinq écoles de la région de Saint-Paul. C’est un défi particulier que de travailler avec des enfants du CP au CM2, tous les niveaux du primaire en même temps. C’est absolument formidable, déconcertant et enthousiasmant ! Ce pays qui me rappelle tant le Brésil m’a remuée. Tout me va : la température de l’eau, les couleurs du ciel et des gens, les fruits, la langue chantante. Et puis, la surprise de lever les yeux, la nuit, et de contempler « mes étoiles » —la Croix du Sud et la ceinture d’Orion— surplomber un autre océan… Les mots des lecteurs L’échange avec les lectrices et les lecteurs est, pour moi, la plus belle surprise de ce métier. « Encore merci d’avoir écrit Les Éveilleurs. Je vous ai rencontrée quand j’avais 15 ans à un salon jeunesse à Troyes. Vous m’avez offert Les Éveilleurs sans savoir qu’ils deviendraient un vrai refuge pour les instants instables du début de ma vie d’adulte. J’en ai aujourd’hui 25 et je ne compte plus le nombre de fois où j’ai pensé à Maya pour m’aider à prendre une décision ou j’ai regardé paresseusement les nuages en ayant en tête l’idéede les sculpter ! »Merci pour tout ✨ Claude Je vous souhaite un Temps Jaune ressourçant! J’aimerais savoir ce que vous pensez de cette newsletter. Écrivez-moi ! Inscrivez-vous ! Inscrivez-vous ! Si vous aimez cette Newsletter, partagez-la avec vos amis ! Que la plume vous soit légère et l’encre fluide !
La mort d’un personnage

Écrire, pour moi, est intimement lié aux émotions. Les émotions des personnages. Celles qu’écrire provoquent en moi. Je ne ressens pas d’angoisse en écrivant. La seule étape de l’écriture qui peut m’angoisser est celle où je n’écris plus ou pas encore. Au cours du processus d’écriture, je peux éprouver de l’inspiration, de la surprise, de l’excitation, de la joie, de l’irritation, de la satisfaction, de l’impatience, des doutes. Je peux être perturbée, désorientée, perplexe, remuée. Des sensations passagères qui s’effeuillent au rythme du flow. On pourrait imaginer que les émotions, les sentiments, la façon de voir le monde des personnages sont toujours identifiés à ceux de l’auteure. C’est sûrement vrai dans les couches profondes et inconscientes de la création. Néanmoins, lorsque dans le récit, un personnage agit, pense, aime, sent, il s’agit d’elle ou de lui, pas de moi. Cela passe par moi qui l’écrit, c’est plus ou moins imprégné de ce que je vis, mais ce n’est pas moi. La distinction est tout à fait claire en ce qui me concerne. Jusqu’à aujourd’hui. Aujourd’hui, je travaille un déjà en majorité écrit, quand je suis saisie par une émotion si forte que j’en ai les larmes aux yeux. Si forte que je suis obligée de m’arrêter et de respirer pour l’apaiser. Ce chapitre raconte la mort d’un personnage. Je sais que ce n’est pas ce que j’ai modifié ou ajouté dans le texte qui a fait émerger ce sentiment. C’est autre chose. Mais quoi ? Je reviens à mon texte et travaille un autre passage du récit avec d’autres personnages. Alors que je me lève pour prendre un dictionnaire, mon regard glisse sur une photo posée sur une étagère : ma mère riant aux éclats à son anniversaire de 90 ans. Plus tard, j’écris à mon frère comme la saudade nous poignarde sans crier gare et comme la douleur, si elle n’est plus constante, ne s’estompe pas. Il me demande s’il s’est passé quelque chose de particulier, je réponds que non. Je ne fais pas le lien. Quelques jours plus tard, alors que je reprends la mort de ce personnage qui ne me satisfait toujours pas, je suis à nouveau saisie d’angoisse : agitation, plexus serré, ventre noué. Je sors marcher, je fais de la paperasse, les courses, je cuisine, j’écoute la radio. Cette fichue angoisse ne se laisse pas distraire et continue à marteler. Ce n’est qu’au milieu de la nuit que je comprends. Lorsque j’ai écrit la première version de la mort de ce personnage, ma mère était vivante. Le personnage n’est pas inspiré de ma mère et le récit de sa mort ne raconte pas celle de ma mère puisqu’il la précède. Cependant, aujourd’hui, trois ans plus tard, je retravaille la mort de ce personnage riche de tout ce que j’ai vécu dans cet intervalle. Même si ce qui se passe entre les personnages n’a pas vraiment changé, moi j’ai changé. J’écris la mort du personnage à la lumière des pertes que j’ai connues. Au mot « lumière », l’angoisse se dégonfle comme une baudruche percée. Oui, lumière. Ces deux morts ont cela en commun, elles sont lumineuses. Parfois, la fiction anticipe le réel. Parfois, l’écriture prédit la vie. Parfois, l’écriture doit attendre que la vie la rattrape pour s’exprimer pleinement. Pour l’une comme pour l’autre, il faut du temps.
Suivre le flow n’est pas procrastiner

Cet été, je n’ai pas écrit pendant une semaine. Une semaine sans ordinateur et j’ai l’impression que cela a duré des mois ! Rentrée depuis quelques jours, je n’ai pas encore ouvert Les Éveilleurs. Dès que je le ferai, le sommeil, les rêves, le passage du temps, tout prendra d’autres couleurs, un autre rythme. Tout se mettra à flotter, tout m’échappera un peu. J’attends le bon moment comme on attend un rendez-vous amoureux. Est-ce que je procrastine ? Pas du tout. Je connais la procrastination, je la pratique assidûment avec les documents administratifs, impôts et autres déclarations Urssaf. Jamais avec l’écriture. Pourquoi? Une affaire de désir. Je ne désire jamais faire ma déclaration d’impôts alors que le désir d’écriture, même embrumé, n’est jamais loin. Notre temps est si minuté que non seulement nous ne disposons plus du temps précieux de la rêverie —terreau de la création— mais nous nous sentons coupables quand le temps n’est pas occupé à « faire » quelque chose. Pourquoi donc ? Est-ce que « vivre » n’est pas suffisant ? Je lis partout que c’est mal de procrastiner et chacun d’y aller de sa petite recette pour combattre le monstre de la procrastination. Je crois que l’on confond, parfois, procrastination (ajourner systématiquement de se mettre au travail) avec le temps de latence (temps qui s’écoule entre un stimulus et la réaction volontaire consécutive). Ce temps de t’attente de l’écriture, cette phase de latence est déjà de l’écriture. Je sais, aujourd’hui, que lorsque je ne me mets pas tout de suite à l’écriture, ce n’est pas par fainéantise ou peur (réussir, ne pas réussir etc.), mais parce que j’ai besoin d’un sas pendant lequel les stimuli et les informations transitent entre les différents acteurs (intellect, âme, corps, cœur, mémoire, rêves) concernés. Tout ce petit monde a besoin d’un délai pour se reconnecter, se reconnaître, réunir ses capacités. C’est fou comme une information apparemment aussi simple que : «maintenant, tu as le temps d’écrire» a besoin d’espace pour s’installer. Tandis que les transmissions se mettent en place consciemment et inconsciemment, je convoque l’écriture à ma façon. J’écris mes pages du matin, je lis, je marche, je range le bureau, je fais des recherches, je danse toute seule pour extérioriser l’énergie qui commence à s’accumuler et ne se manifeste pas encore dans l’écriture. Et, surtout, j’essaye de ne pas ajouter de l’anxiété à cette phase suffisamment pénible, je m’applique à ne pas sombrer dans des considérations parfaitement inutiles (tout cela en vaut-il vraiment la peine ? Va-t-on m’éditer, me lire ? Blabla…). Quand commence cette petite rengaine, je sors les armes lourdes. Après avoir vérifié que ce truc inexplicable que je sens en moi depuis que j’ai 10 ans est toujours présent —l’envie d’écrire—, je proclame mon souhait sincère et féroce de m’y mettre. Je le répète comme un mantra, je le balance à l’univers, aux génies de l’écriture, aux mânes des écrivaines qui sont passées par là. Et j’attends. Et j’espère. Bref, je pratique de mon mieux le lâcher-prise, la foi d’écrire, appelez-le comme vous voulez. Une pratique, donc. J’aimerais vous dire que tout cela se déroule dans la sérénité et que, forte de mon expérience, j’attends patiemment que cette phase passe, un doux sourire aux lèvres et une tasse de thé à la main. Pas du tout. La patience est une qualité qui m’échappe. Le sommeil est troublé par cette affliction sourde, je fais des rêves épuisants, je paume mes clefs, je crame le riz, je refuse les invitations alors que je me sens terriblement seule. La solitude nécessaire au travail paraît insupportable quand elle est désertée par l’écriture. Donc je m’énerve. Je m’énerve de plus en plus. L’avantage, c’est que sachant qu’il s’agit d’une étape, j’évite les lamentations, le masochisme, l’auto-commisération. C’est déjà pas mal. Enfin, après plusieurs jours ou plusieurs semaines où je n’en peux plus de me faire balader par tout ça, je sens le moment venu. Je me lance donc. Je range mon bureau, je fais le plein de café et de chocolat, j’ouvre mes fichiers. J’écris. Tous les jours. Même peu. Même mal. Et, comme le coureur qui, peu à peu, sème son poing de côté, je dépasse le point critique, j’entre en écriture. La prochaine étape est celle où, totalement immergée dans le fleuve, je n’aurai plus peur, plus froid, plus de poing de côté. Je serai dans le flow. Pendant des semaines, des mois… Jusqu’à une nouvelle pause, une nouvelle latence… Et tout recommence. Et vous ? Comment vivez-vous le flow ? Racontez-le ici :
Mercure a été rétrograde du 23 août au 15 septembre !

Dans les mythologies grecque et latines, Hermès ou Mercure, est le dieu qui sert de messager aux dieux entre eux et qui transmet les messages des dieux aux hommes. C’est le gars qui a un casque ailé et des petites ailes aux pieds. En astrologie, cette planète représente la communication, le commerce, les voyages. Mercure, c’est du vif-argent. Mais, de temps en temps, il a un coup de mou, il va moins vite, moins bien, moins fluide. Quand il est rétrograde, ses caractéristiques se manifestent a contrario. Quand les trucs commencent à prendre du retard, à ne pas fonctionner, quand ce qui pourrait se faire vite et simplement devient lent et compliqué, jetez un coup d’œil à Mercure. S’il est rétrograde, ça ne sert à rien de s’énerver. On peut essayer de ne pas voyager, de pas signer de contrat, de ne pas acheter de machines, de ne pas entreprendre des démarches qui nécessitent des réponses rapides, une communication claire. Si ce n’est pas possible, vous pédalerez peu ou prou dans la semoule mais les choses se feront quand même. Mon expérience avec Mercure rétrograde, c’est que ces contrariétés sont pénibles mais souvent bénéfiques. Les trains ont du retard mais ils partent et ils arrivent. Les rendez-vous reportés importants finissent pas avoir lieu. Ce n’est jamais un écueil définitif et, surtout, cela peut ouvrir sur de nouvelles opportunités. Mercure rétrograde me rappelle que je n’ai pas le contrôle sur tout. C’est reconnaître : oups, il se passe un truc qui n’est pas de ma responsabilité et que je ne peux ni empêcher ni réparer. J’essaye de le comprendre et l’accepter, ce n’est pas la même chose. En revanche, ce qui est de ma responsabilité, ce que je peux contrôler, c’est comment je vais faire face à ces contrariétés. Savoir que Mercure est rétrograde m’évite de monter dans les tours parce que le site de l’Urssaf ne marche pas (c’est le cas même quand Mercure fait le taf), je suis plus attentive aux opportunités, je perds moins d’énergie à me lamenter. Croire ou ne pas croire à l’astrologie n’est pas la question. Ce qui est intéressant c’est de se frotter et de réfléchir au sentiment d’impuissance et à la nécessité de contrôle. Salve, Mercurius ! Prochaine rétrogradation de Mercure : du 13 décembre au 1er janvier 2024. On en reparlera ☺
Newsletter #2

NEWSLETTER • Écrire comme on respire NEWSLETTER Écrire comme on respire Octobre 2023 Lectrices, Lecteurs ! Des nouvelles des Éveilleurs Plonger dans le flow Les mots des lecteurs Idées de lecture Et le monde dans tout ça ? Des nouvelles des Éveilleurs J’avais prévu que le Temps Jaune serait consacré à boucler le tome 5 des Éveilleurs avec l’écriture des Chroniques de Borges et les passages dans les limbes. Cela impliquait d’avoir terminé les deux derniers chapitres. L’objectif était d’entamer le T6 dès septembre. J’avais hâte. J’avais tort. Les chapitres sont écrits mais je n’en suis pas satisfaite. Je le sens dans mon ventre : ce n’est pas encore ça. Il en va du flow comme du vent dans les voiles. Parfois il ralentit, stagne, s’immobilise presque. Le rythme du processus créatif est imprédictible. On peut organiser méthodiquement son temps de travail et s’y mettre sans faillir, on n’en contrôle pas l’efficacité. Une journée d’écriture peut être extraordinairement fertile ou étonnamment ingrate. Mais c’est parce qu’il y a eu la traversée aride que l’oasis brille. Si, si… Plonger dans le flow Suivre le flow n’est pas procrastiner Cet été, je n’ai pas écrit pendant une semaine. Une semaine sans ordinateur et j’ai l’impression que cela a duré des mois! Dès que je retournerai aux Éveilleurs, le sommeil, les rêves, le passage du temps, tout prendra d’autres couleurs, un autre rythme. Tout se mettra à flotter, tout m’échappera un peu. J’attends le bon moment comme on attend un rendez-vous amoureux. Est-ce que je procrastine ? Pas du tout. Je connais la procrastination, je la pratique assidûment avec les documents administratifs, impôts et autres déclarations Urssaf. Jamais avec l’écriture. Pourquoi? Une affaire de désir. Je ne désire jamais faire ma déclaration d’impôts alors que le désir d’écriture, même embrumé, n’est jamais loin. Notre temps est si minuté que non seulement nous ne disposons plus du temps précieux de la rêverie —terreau de la création— mais nous nous sentons coupables quand le temps n’est pas occupé à « faire » quelque chose. Pourquoi donc ? Est-ce que « vivre » n’est pas suffisant ? Lire la suite Les mots des lecteurs L’échange avec les lectrices et les lecteurs est, pour moi, la plus belle surprise de ce métier. « Rêver est sérieux. Les Éveilleurs me l’ont rappelé : ce sont les heures que Claris a passé à lire et à imaginer qui lui ont ensuite permis de donner à sa vie la direction et les couleurs qu’elle souhaite, ce sont les heures passées à rêver qui ont permis à Jad de se trouver puis lui ont donné le courage de passer à l’action. Le rêve nous invente, reste ensuite à tirer son épée/sa plume/ses chaussures/ses manches pour se réaliser. » Laerolivre Idées de lecture À chaque newsletter, une petite biblio : Le Royaume de Pierre d’Angle, Pascale Quiviger, quatre tomes.Cela faisait longtemps que je n’avais pas autant aimé une saga.Des personnages formidables, une écriture jubilatoire, une liberté inspirante.Ce livre a une âme. Il m’a littéralement enchantée.J’ai eu la chance de rencontrer l’autrice qui est aussi chouette que son œuvre ! Échange de dédicaces à la librairie Ombres Blanches, Toulouse Et le monde dans tout ça ? (rubrique flottante, floue, fantasque) Mercure a été rétrograde du 23 août au 15 septembre ! Dans les mythologies grecque et latines, Hermès ou Mercure, est le dieu qui sert de messager aux dieux entre eux et qui transmet les messages des dieux aux hommes. C’est le gars qui a un casque ailé et des petites ailes aux pieds. En astrologie, cette planète représente la communication, le commerce, les voyages. Mercure, c’est du vif-argent. Mais, de temps en temps, il a un coup de mou, il va moins vite, moins bien, moins fluide. Quand il est rétrograde, ses caractéristiques se manifestent a contrario. Quand les trucs commencent à prendre du retard, à ne pas fonctionner, quand ce qui pourrait se faire vite et simplement devient lent et compliqué, jetez un coup d’œil à Mercure. S’il est rétrograde, ça ne sert à rien de s’énerver. Lire la suite J’aimerais savoir ce que vous pensez de cette newsletter. Écrivez-moi ! Inscrivez-vous ! Inscrivez-vous ! Si vous aimez cette Newsletter, partagez-la avec vos amis ! Que la plume vous soit légère et l’encre fluide !
Newsletter #1

NEWSLETTER • Écrire comme on respire NEWSLETTER Écrire comme on respire Juillet 2023 Lectrices, Lecteurs ! Je suis heureuse de vous présenter ma première newsletter « Écrire comme on respire » ! Nous y parlerons des Éveilleurs et du processus d’écriture : Des nouvelles des Éveilleurs Plonger dans le flow Les mots des lecteurs Idées de lecture Et le monde dans tout ça ? Des nouvelles des Éveilleurs J’ai repris mon bâton de Nomade pour arpenter les chemins du Nomadstère. Au Temps Rouge et au Temps Blanc (d’octobre à janvier), j’ai repris les notes écrites ces six dernières années, les plans et les schémas pour les deux derniers tomes des Éveilleurs. J’ai revu dossiers, fichiers, tableaux. J’ai organisé, planifié, classé, coordonné à en devenir dingue. Au Temps Vert (février à juin), j’ai repris le tome 5 des Éveilleurs, Le Nomadstère, en relisant avec toutes mes loupes, en recoupant avec les notes et les plans.Il me reste les deux derniers chapitres !!! Le Temps Jaune sera consacré à écrire les Chroniques de Borges et les passages dans les limbes qui intègreront le récit. Puis, viendra le moment d’une seconde relecture du volume entier pour les derniers détails. À la rentrée, j’aborde les rivages du Tome 6, celui de la fin de l’histoire…Et ça, ça… Je ne saurais vous dire à quel point j’ai hâte. Un extrait de Le Nomadstère (Les Eveilleurs, vol 5, inédit.) Tous mes livres parlent d’écriture et de lecture, d’une façon ou d’une autre. Les Éveilleurs, plus que les autres. Dans Le Nomadstère, Claris passe les examens pour intégrer l’école où elle espère apprendre son métier de Nomades de l’Écriture. « La bibliothèque occupait un immense volume circulaire, réparti sur tous les étages du Lectura. Claris n’en apercevait qu’une petite partie, les étages supérieurs se perdant dans l’obscurité. D’innombrables rouleaux étaient rangés dans leurs niches en nids d’abeille, des milliers de codex et de livres habitaient les étagères qui couvraient les murs ou étaient serrés dans des armoires garnies de treillis pour les protéger des rongeurs. Un système ingénieux d’échelles coulissantes permettait d’accéder aux ouvrages en hauteur. Au premier niveau, la salle ronde où arrivèrent les Postulants était occupée par de grandes tables en bois brut, non équarries mais polies par l’usage. C’était comme si les arbres d’eux mêmes s’étaient couchés là, hommage des Nomades aux êtres végétaux qui leur fournissaient le support et le confort indispensables à leur office. Des chaises à hauts dossiers les entouraient et de profonds fauteuils leurs tendaient les bras. Les flambées étaient bannies d’un lieu dédié aux livres et les grands braséros remplis de charbons ardents ne suffisaient pas à chauffer un tel volume mais des piles de plaids attendaient les lecteurs. Lire la suite Plonger dans le flow J’ai assez tôt lu des journaux d’écrivains que j’aimais (Virginia Woolf, Anaïs Nin, Sylvia Plath, Catherine Mansfield, J. L. Borges…) J’écrivais déjà mais je n’y allais pas pour chercher des tuyaux. Je dévorais ces journaux parce que ce que ressentaient les écrivains pendant qu’ils écrivaient me passionnait. Je m’identifiais à ça : au processus. Lorsque j’ai commencé à publier, sont venues les questions en interviews ou dans les écoles : comment écrivez-vous, où trouvez-vous l’inspiration, pourquoi avez-vous voulu devenir écrivaine ? Pour y répondre le plus honnêtement possible, je me suis intéressée à mon propre processus d’écriture. Lorsque j’ai commencé à accompagner des gens qui veulent écrire, j’ai constaté qu’ils sont souvent perdus avec ce processus. Tout le monde veut une méthode mais il n’y a que des processus d’écriture singuliers. Chacun doit trouver et construire le sien. Même si certaines étapes sont communes et que savoir comment se débrouillent est toujours intéressant, ce qui marche pour les uns ne marche pas pour les autres. La seule façon de savoir ce qui marche pour soi : essayer encore et encore, écrire encore et encore. C’est ce que je propose à ceux que j’accompagne : les aider à découvrir ce qu’ils veulent écrire et comment ils peuvent le faire, à apprivoiser, note par note, leurs propres rythmes d’écriture. Ce rythme, cette musique, que j’ai commencé à explorer à dix ans. Comment tout a commencé… Quand j’avais 10 ans, mon prof de CM1 qui s’appelait M. Milési —c’est le seul nom de prof de l’école primaire dont je me souvienne— a eu la bonne, la fantastique, l’initiatique idée de proposer aux élèves de faire des textes libres. Des rédactions qui ne seraient pas notées. Et surtout : ON N’ÉTAIT PAS OBLIGÉ ! Libres, vous dis-je. Juste pour le plaisir.Sur le mur, était accrochée la liste des élèves.Pour chaque texte écrit, M. Milési dessinait 1 point bleu à côté du nom.3 points bleus = 1 point rouge.3 points rouges = 1 livre que M. Milési achetait de ses propres deniers. Lire la suite Les mots des lecteurs À chaque newsletter, je vous confie un message des lecteurs. L’échange avec les lectrices et les lecteurs est, pour moi, la plus belle surprise de ce métier. Ils m’écrivent sur le blog, sur le site, sur les réseaux sociaux. Et je leur réponds toujours. « Je me souviens de petite N., douze ans, l’âge des jumeaux, qui découvrait Salicande pour la première fois. Le vieux livre bleu du premier tome est corné, il est même une fois tombé entre les mains d’une petite cousine qui l’a gribouillé de toutes ses forces. J’ai recopié la page presque illisible et j’ai continué à lire. Combien de longues soirées d’hiver j’ai passées, sur des feuilles immenses, à essayer de créer les règles du jeu des Milles Chemins, combien de calculs plus ou moins savants pour trouver comment recréer un dé à cinq faces. Quand j’étais au lycée, j’ai fait la lecture pour mes frères, avant que le bac et le stress de se demander quelle adulte j’allais bien pouvoir devenir ne m’emportent ailleurs. Dans les tomes suivants, j’ai appris à aimer Chandra, sa fougue et son indépendance, à haïr Blaise et à lui pardonner, à admirer et craindre Jwel comme une sœur. J’ai rêvé
Comment j’ai fait pleurer les CM2

Les dernières rencontres de l’année se sont déroulées, en juin, autour de L’arbre, le chat, le grand-père ou La vraie vie de Lamor, à Coulommiers où le livre concourrait au prix Minotaure. J’y ai rencontré six classes de CM2. Nous avons d’abord échangé sur le livre, discuté, j’ai répondu à leurs questions. Évidemment, nous avons beaucoup parlé de la mort qui est le thème du livre. Les enfants parlent de la mort beaucoup plus librement que les adultes. Peut-être parce qu’ils s’en sentent encore très loin. Peut-être juste parce que ce sont des enfants et qu’ils sont (encore) libres d’un certain nombre de tabous. Dans la deuxième partie de la rencontre, je leur propose d’écrire. Ils acceptent avec enthousiasme, s’installent comme ils veulent dans le CDI, sur les tables, sur les tables, dans les fauteuils, par terre et commencent. Je passe parmi eux, je leur parle, un par un. J’écoute, j’encourage, je file un coup de pouce. Il suffit souvent de pas grand-chose pour les « débloquer », une autorisation, un « voilà une bonne idée !» Je propose plusieurs thèmes parmi lesquels « écrivez ce que vous voulez ». À Coulommiers, la majorité a choisi de parler de la mort. Ils n’ont pas réfléchi longtemps. Ils s’y étaient déjà quasiment tous frottés, à Lamor. Ils écrivent. Et ils pleurent. Alors les copains et les copines viennent les voir, les consolent. Ils se parlent, ils échangent leurs morts. Il y a la mort de la poule chérie, la mort du chat, du chien, de la grand-mère, du grand-père, de la tata qu’on adorait, de l’oncle en Afrique enrôlé malgré lui comme soldat… Puis, ceux qui veulent viennent lire. On s’écoute. On se regarde. On pleure encore, on rit aussi, « je savais pas qu’une poule ça faisait des câlins ». Ils disent : « Ça fait du bien d’en parler et encore plus de l’écrire» « Je savais pas que les autres aussi, ils connaissaient la mort » « C’est normal de pleurer, faut pas avoir honte », « Écrire la mort, ça fait comme un poids en moins». Je ne pourrais pas mieux dire. Écrire, ça fait comme un poids en moins. Cliquez ici pour voir la page dédiée au roman.
Comment tout a commencé…

Quand j’avais 10 ans, mon prof de CM1 qui s’appelait M. Milési —c’est le seul nom de prof de l’école primaire dont je me souvienne— a eu la bonne, la fantastique, l’initiatique idée de proposer aux élèves de faire des textes libres. Des rédactions qui ne seraient pas notées. Et surtout : ON N’ÉTAIT PAS OBLIGÉ ! Libres, vous dis-je. Juste pour le plaisir. Sur le mur, était accrochée la liste des élèves. Pour chaque texte écrit, M. Milési dessinait 1 point bleu à côté du nom. 3 points bleus = 1 point rouge. 3 points rouges = 1 livre que M. Milési achetait de ses propres deniers. Liberté + plaisir + cadeau, cela ressemblait si peu à l’école, c’était irrésistible ! Je me souviens parfaitement du frisson qui m’a parcourue de la tête aux pieds —et dedans aussi—, quand j’ai posé mon stylo sur la page blanche. Un frisson d’excitation, de peur, d’aventure. J’ai regardé en l’air, en mordillant mon bic, une idée est passée. Je l’ai attrapée. Des mots chevauchaient l’idée. Je les ai écrits. Un mot en appelle une autre, une idée en tire une autre. Le texte est venu tout seul. Un deuxième, un troisième, un quatrième ont suivi. J’avais plus de points rouges que si j’avais attrapé la rougeole. À la fin de l’année, M. Milési m’avait offert une petite bibliothèque. Les vannes de l’écriture étaient ouvertes, j’avais trouvé le chemin du puits aux histoires. Cette source interne que je ne cesse d’explorer. Je n’ai plus jamais arrêté d’écrire. J’ai toujours cette sensation, la même : qu’il suffit d’ouvrir quelque chose en soi, de se brancher à quelque chose en soi et autour de soi, pour que les idées viennent, coulent, affluent… Une relation magique à l’écriture ? Que nenni ! Ou plutôt, comme dirait Blaise dans Les Éveilleurs: « Rien n’est magique puisque tout est magique ! » Ça, c’est le premier mouvement. Ensuite, vient le second mouvement : travail. Après l’inspiration, la transpiration. Écrire, barrer, chercher, corriger, polir, écrire, biffer, sertir, limer, poncer, creuser, écrire, lécher, couper, panser, peaufiner, écrire écrire écrire… Vers 16 ans, j’ai commencé à écrire de petits textes, de la poésie. Pas de personnages, pas d’intrigue. Le travail des mots et la musique. Écrire de la poésie, c’était comme écouter une musique faite de sensations, d’émotions, de pensées, et essayer de la retranscrire en mots. J’ai passé des centaines d’heures de mon adolescence, immobile sous un arbre (très bénéfique les arbres) ou sur le toit de la maison (très vertigineux les toits), ou dans le hamac sur la véranda, à écouter dedans et à regarder dehors. Le vent, le soleil, un oiseau qui vole, une branche qui craque, le galop d’un chien, les eucalyptus qui se balancent au-dessus du lac, le jardinier qui fauche d’un bras rythmé. Sensations. Sous l’arbre ou sur le toit en suçotant le bic, je cherchais à traduire ces sensations en mots. Chercher le mot le plus adéquat, voir comment il s’agence avec son voisin, provoquer les rimes, les enchaînements, le rythme, le son, la chute. Travail. J’ai découvert que le travail des mots gonflait la liberté et m’apportait une joie qui ne tarit pas. Pour moi, la prose ne fonctionne pas tout à fait comme la poésie. Tout d’abord, parce qu’il y a les personnages. Les personnages sont vivants, ils ont leur vie, leur histoire, leurs envies, leurs désirs, leurs dégoûts, leurs doutes, leurs ombres. Il faut les écouter, apprendre à les connaître, les laisser grandir. Puis, il y a l’intrigue. On ne raconte pas une histoire n’importe comment. Il faut construire. Ça, c’est l’architexture. Ainsi, mon écriture se déploie en deux mouvements à la fois parallèles et concomitants: d’une part, les idées, les images, la création, l’imagination…. D’autre part, la construction, le tricot, la cuisine, la musique, l’architexture… L’un ne va pas sans l’autre. Les deux composent le flow. Comme cette balançoire où deux enfants se font face enfant. L’un monte quand l’autre descend. Tout seul, rien ne bouge. C’est le poids de l’un qui permet à l’autre de s’envoler. Il y a des jours, des phases, où le puits est fécond et les idées bouillonnent. On s’envole. D’autres où l’on pose une brique après l’autre, les bras lourds. On soupire. Et puis, il y a des moments bénis où l’on fait les deux à la fois : transinspiration ! Je ne sais jamais, en m’asseyant à mon ordinateur le matin, si je vais être inspirée ou transpirer. Ou les deux. Cela fait partie du jeu. C’est mon travail, ma passion, mon plaisir, ma joie et ma liberté. Et enfin, vient le troisième mouvement : offrir le récit aux lecteurs. Nous en parlerons une prochaine fois 🙌