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Suivre le flow n’est pas procrastiner

 

Cet été, je n’ai pas écrit pendant une semaine. Une semaine sans ordinateur et j’ai l’impression que cela a duré des mois ! Rentrée depuis quelques jours, je n’ai pas encore ouvert Les Éveilleurs. Dès que je le ferai, le sommeil, les rêves, le passage du temps, tout prendra d’autres couleurs, un autre rythme. Tout se mettra à flotter, tout m’échappera un peu. J’attends le bon moment comme on attend un rendez-vous amoureux.

Est-ce que je procrastine ? Pas du tout. Je connais la procrastination, je la pratique assidûment avec les documents administratifs, impôts et autres déclarations Urssaf. Jamais avec l’écriture. Pourquoi? Une affaire de désir. Je ne désire jamais faire ma déclaration d’impôts alors que le désir d’écriture, même embrumé, n’est jamais loin.

Notre temps est si minuté que non seulement nous ne disposons plus du temps précieux de la rêverie —terreau de la création— mais nous nous sentons coupables quand le temps n’est pas occupé à « faire » quelque chose. Pourquoi donc ? Est-ce que « vivre » n’est pas suffisant ?

Je lis partout que c’est mal de procrastiner et chacun d’y aller de sa petite recette pour combattre le monstre de la procrastination. Je crois que l’on confond, parfois, procrastination (ajourner systématiquement de se mettre au travail) avec le temps de latence (temps qui s’écoule entre un stimulus et la réaction volontaire consécutive).
Ce temps de t’attente de l’écriture, cette phase de latence est déjà de l’écriture.

Je sais, aujourd’hui, que lorsque je ne me mets pas tout de suite à l’écriture, ce n’est pas par fainéantise ou peur (réussir, ne pas réussir etc.), mais parce que j’ai besoin d’un sas pendant lequel les stimuli et les informations transitent entre les différents acteurs (intellect, âme, corps, cœur, mémoire, rêves) concernés. Tout ce petit monde a besoin d’un délai pour se reconnecter, se reconnaître, réunir ses capacités. C’est fou comme une information apparemment aussi simple que : «maintenant, tu as le temps d’écrire» a besoin d’espace pour s’installer.

Tandis que les transmissions se mettent en place consciemment et inconsciemment, je convoque l’écriture à ma façon. J’écris mes pages du matin, je lis, je marche, je range le bureau, je fais des recherches, je danse toute seule pour extérioriser l’énergie qui commence à s’accumuler et ne se manifeste pas encore dans l’écriture. Et, surtout, j’essaye de ne pas ajouter de l’anxiété à cette phase suffisamment pénible, je m’applique à ne pas sombrer dans des considérations parfaitement inutiles (tout cela en vaut-il vraiment la peine ? Va-t-on m’éditer, me lire ? Blabla…).

Quand commence cette petite rengaine, je sors les armes lourdes. Après avoir vérifié que ce truc inexplicable que je sens en moi depuis que j’ai 10 ans est toujours présent —l’envie d’écrire—, je proclame mon souhait sincère et féroce de m’y mettre. Je le répète comme un mantra, je le balance à l’univers, aux génies de l’écriture, aux mânes des écrivaines qui sont passées par là. Et j’attends. Et j’espère. Bref, je pratique de mon mieux le lâcher-prise, la foi d’écrire, appelez-le comme vous voulez. Une pratique, donc.

J’aimerais vous dire que tout cela se déroule dans la sérénité et que, forte de mon expérience, j’attends patiemment que cette phase passe, un doux sourire aux lèvres et une tasse de thé à la main. Pas du tout. La patience est une qualité qui m’échappe. Le sommeil est troublé par cette affliction sourde, je fais des rêves épuisants, je paume mes clefs, je crame le riz, je refuse les invitations alors que je me sens terriblement seule. La solitude nécessaire au travail paraît insupportable quand elle est désertée par l’écriture. Donc je m’énerve. Je m’énerve de plus en plus. L’avantage, c’est que sachant qu’il s’agit d’une étape, j’évite les lamentations, le masochisme, l’auto-commisération. C’est déjà pas mal.

Enfin, après plusieurs jours ou plusieurs semaines où je n’en peux plus de me faire balader par tout ça, je sens le moment venu. Je me lance donc. Je range mon bureau, je fais le plein de café et de chocolat, j’ouvre mes fichiers. J’écris. Tous les jours. Même peu. Même mal. Et, comme le coureur qui, peu à peu, sème son poing de côté, je dépasse le point critique, j’entre en écriture.

La prochaine étape est celle où, totalement immergée dans le fleuve, je n’aurai plus peur, plus froid, plus de poing de côté. Je serai dans le flow. Pendant des semaines, des mois… Jusqu’à une nouvelle pause, une nouvelle latence… Et tout recommence.

Et vous ? Comment vivez-vous le flow ? Racontez-le ici :

🪶Abonnez-vous à ma newsletter mensuelle Écrire comme on respire. On y parle des Éveilleurs, du processus d’écriture, des lecteurs…
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1 commenter

Dominique Barbot 31 octobre, 2023 - 9:07 pm

Sempre bom ler você!
A criação nas artes é semelhante. O fato de estar na nossa terra atormenta e enriquece ainda mais esse processo. Os encontros, as sensações enchem o poço de uma mistura borbulhante que você conhece tão bem.
Só agora encontrei o momento propício para ler e responder por aqui.
Hâte de te lire!
Beijos amiga! Sonhando em Ile-Roussear no Rio juntas.

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