21 novembre, 2024 6:31 am
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Vol. 5 – Le Nomadstère

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« Dans “Le Nomadstère”, le Lecteur arpente les fascinants chemins du rêve,
il tremble, rit, aime. Le Lecteur écrit. Il voyage… »

Dans ce tome 5 des Éveilleurs, se déploie un nouveau pan de l’univers des Éveilleurs: le Nomadstère. Le Lecteur pénètre dans le siège de la Guilde des Nomades de l’Écriture, une école avec ses professeurs et ses élèves, ses secrets et ses souvenirs d’un autre temps, un monde à lui seul. Au gré de l’apprentissage de Claris, il se perd dans les couloirs et erre dans les cloîtres; il frémit lors des examens et s’extasie devant les trésors de la Babelthèque. Un lieu de mémoire et de savoir, moins serein qu’il n’y paraît… Un monde que Claris doit apprendre à maîtriser, comme elle doit apprendre les disciplines de son apprentissage pour y trouver de nouvelles clefs de son passé et de son avenir.

Extraits inédits de Le Nomadstère !

Consultez régulièrement cette page pour des nouvelles du tome 5 em cours d’écriture!

« Une lueur éclaira l’entrée de la pièce, accompagnée d’un froissement de robe tandis qu’un Nomade se baissait pour passer sous le porche, une lampe à huile à la main. Long et sec comme un jour sans pain, il portait lui aussi une coule blanche et une robe noire. La plume d’argent qui ornait son écritoire attestait qu’il s’agissait d’un Nomade accompli. Il leva la lampe et révéla un visage taillé à la serpe surmonté de cheveux drus coupés en brosse. Des yeux d’un vert glauque balayèrent lentement l’assistance.
— Bienvenus au Nomadstère.
— Sûr, il a l’air fou de joie, souffla Tüs à Claris.
L’homme lui lança un regard glacial.
— Je suis le Régulateur du Nomadstère, chargé de faire respecter la Règle et de sanctionner toute infraction à l’Observance. De facto, on m’appelle aussi l’Observateur.
La voix sinueuse, onctueuse, ne s’accordait ni avec le personnage ni avec ses propos. Claris en eut froid dans le dos. »

« La conversation fut interrompue par l’arrivée d’un nouveau professeur. Après un rapide salut Nomade, l’homme prit les feuillets qu’il survola rapidement un à un, puis les enfouit, en vrac, dans sa poche, comme s’il s’agissait de mouchoirs usés.

— Bonjour, je suppose que vous savez qui je suis.

Le ton hésitant laissait entendre qu’il en doutait lui-même. La voix était effacée, comme si elle parvenait à son interlocuteur à travers une grande distance. De taille moyenne, chauve, ramassé sur lui même, flottant dans une robe trop grande, il émanait une de lui une vulnérabilité, une inconsistance. Jusqu’à ce qu’il lève les yeux: derrière ses lunettes en équilibre sur le bout du nez, deux flaques ambrées éclaboussaient son visage noir. Des yeux de faon rêveur dans un visage usé.

— Je suis le Mémorisateur… Vous pouvez m’appeler Mémor.

Il y eut une longue pause. Les postulantes échangèrent un regard perplexe. Le Professeur regardait dans le vide. Puis, il bailla comme s’il revenait du sommeil ou d’un voyage.

— Vous pouvez m’appeler Mémor, répéta t-il. Voyons, qui de vous aurait l’obligeance de me réciter quelque chose ? Une de ces choses que vous deviez apprendre, dit-il en tapotant sa poche gonflée par leurs copies. N’importe quoi.

— Avez-vous rêvé cette nuit, mon enfant ?

Cendre hocha la tête.

— Vous en souvenez-vous ? Non, bien sûr. Les rêves sont notre trésor le plus intime, ils sont la source et le puits, le départ et l’arrivée. Or, fous que nous sommes, nous les négligeons. Je vous apprendrai à vous souvenir de vos rêves, à les arpenter. Nous explorerons ensembles les arcanes de votre cerveau.

Il se tut à nouveau un long moment. Les Postulantes étaient suspendues à ses lèvres. Le Nomade dégageait un curieux magnétisme qui émanait de la musique de ses mots: fluctuante, souvent rêveuse ou langoureuse, elle connaissait de soudaines accélérations, des envolées lyriques ponctuées d’exclamation d’un enthousiasme contagieux. Mémor parlait comme un petit enfant qui apprend à courir, avec des pointes de vitesse, des chutes, des arrêts soudains.

— … à les arpenter, oui. A les façonner. Avez-vous déjà entendu parler des rêveurs lucides ? Non ? Merveilleux ! »

Des photos

« Le Grand Degré déboucha sur une terrasse donnant sur le vide. La Postulante qui guidait le groupe ne leur laissa guère le temps de se pencher sur l’espace vertigineux où miroitaient le lac noir et ses sables mouvants. Elle les dirigea sur la droite et ils pénétrèrent, enfin, dans le bâtiment proprement dit du Nomadstère. Elle les fit traverser à la hâte une longue nef, leurs pas résonnaient sur les dalles dans les volumes immenses. Tüs tira Claris par la manche:
— Regarde !
Sur la gauche était une cage de lumière, haute, élégante, élancée. Sa voûte lambrissée culminait à plus de vingt mètres et la lumière qui se déversait par les baies et les fenêtres happait le regard vers le haut. Emerveillée, Claris pensa qu’elle n’avait jamais rien vu d’aussi flamboyant. D’aussi triste aussi. Au cœur même de la beauté, une profonde affliction sourdait qui ne concordait pas avec l’élan pur né de la délicate harmonie de la pierre et de la lumière. Des picotements coururent sur ses bras, sa nuque, semblables aux chatouilles des Vifs sur son âme. Elle frissonna, les chercha du regard. Mais la sensation se dissipa, comme effacée par le charme qui se dégageait de la nef.
Tüs la tira de sa contemplation.
— Viens!
Tandis qu’ils couraient pour rejoindre les autres, Claris le questionna:
— Quel est ce lieu?
— Le Lectura. Un endroit pour lire ? Mais bon, il s’agit du Nomadstère, c’est sûrement plus subtil que ça…
Un endroit pour lire! se répéta t-elle. Lire dans ce ruissellement de lumière doit être le paradis… »

« La bibliothèque occupait un immense volume circulaire, répartie sur les cinq étages du Lectura. Elle n’en apercevait qu’une partie, les étages supérieurs se perdant dans l’obscurité. D’innombrables rouleaux étaient rangés dans leurs niches en nids d’abeille, des milliers de codex et de livres habitaient les étagères qui couvraient les murs ou étaient serrés dans des armoires garnies de treillis pour les protéger des rongeurs. Un système ingénieux d’échelles coulissantes permettait d’accéder aux ouvrages en hauteur. A l’opposé de l’atelier de JeanCris, il régnait ici une organisation austère.
Au premier niveau, la salle ronde où arrivèrent les Postulants était occupée par de grandes tables en bois brut, non équarries mais polies par l’usage. C’était comme si les arbres d’eux mêmes s’étaient couchés là, hommage des Nomades aux êtres végétaux qui leur fournissaient le support et le confort indispensables à leur office. Des chaises à hauts dossiers les entouraient et de profonds fauteuils leurs tendaient les bras. Les flambées étaient bannies d’un lieu dédié aux livres et les grands braséros remplis de charbons ardents ne suffisaient pas à chauffer un tel volume.
Dans les étages, l’éclairage étudié provenait de dizaines de lampes à huile suspendues pour éviter les accidents et protégées par des manchons de verre. Au rez-de-chaussée, brûlait continuellement un gigantesque candélabre à vingt-huit branches. Il était accroché à la poutre centrale, ses bougies réparties en deux cercles concentriques.
Soudain, Swo poussa un cri. Un chaton roux se frottait à elle. Elle le caressa en riant et Claris vit qu’Anelore en faisait autant avec un autre chaton qui ressemblait au premier comme deux gouttes d’eau. Il y eut un mouvement sur une table. Une ombre passa devant une lampe. Trois gouttes d’eau ! Il y avait des chats partout. Perchés sur les armoires, les étagères, couchés sur les volumes, blottis sur les chaises à proximité des braseros, sur les accoudoirs des fauteuils, jouant autour des pieds de table. »

Des photos

« — Candidats, vous êtes ici réunis pour la seconde étape de votre période de sélection: les examens au terme desquels vous serez ou non admis au Nomadstère en qualité de Postulants. Vous tirerez au sort quatre noms parmi les Maîtres Nomades qui composent le corps enseignant. J’ai nommé les six disciplines traditionnelles: grammaire et orthographe ; rhétorique et dialectique ; calligraphie et enluminure ; lecture ; rédaction et contact-défense ; déclamation et mémorisation. En outre, vous passerez tous le test de condition physique et d’aptitude à l’apprentissage des techniques d’auto-défense.

Six disciplines ? N’étaient-elles pas douze comme les douze Nomades Fondateurs ? Et qu’en était-il des fictionneur, légendeur, émerveilleur, palabreur, fabulateur, dont lui avait parlé Maya ? De la danse, du théâtre cités dans le récit d’Esper ? De toute évidence, ce n’était pas le moment de le demander.

— Vous tirerez également deux noms parmi ceux des six Maîtres responsables des différents secteurs du Nomadstère où vous serez appelés à servir si vous êtes admis. A savoir: l’intendance, l’infirmerie, les ateliers, les cuisines, les jardins, les soins aux animaux.

A mesure que l’Observateur citait leurs fonctions, douze Nomades s’avancèrent et formèrent un cercle autour des candidats. Certains portaient la cape, d’autres la coule mais tous avaient tiré la capuche sur leur visage. Ils tenaient un faisceau de bâtonnets dont une extrémité peinte à la couleur de chaque discipline était dissimulée dans leur poing. »

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« Claris ne put rien avaler du repas qu’on lui glissa par la fenestrelle. Une fois retombée la colère hostile qu’avait provoqué en elle le comportement de l’Observateur, il lui semblait qu’elle avait répondu à côté des questions et que la carte qu’elle avait dessinée n’était pas assez précise. Que ferait-elle si elle était disqualifiée? »

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