« Si les morts… un jour.
Mais ça veut dire toujours là.
On les garde à vie. »
Paulo, onze ans, assiste à l’enterrement de son grand-père. Un enterrement des plus animés, dans un cimetière immense aux airs de parcours de golf. Soudain, la mère de Paulo tombe assise sur les genoux du cousin le plus confortable de la famille. Ses contractions ont commencé, la soeur ou le frère de Paulo est sur le point de naître. Pendant que ses parents sont à la maternité, Paulo reste chez sa grand-mère avec sa petite cousine Jade, cinq ans. Tout à coup, Paulo remarque que la porte du bureau de son grand-père, pour la toute première fois, est ouverte. Paulo ne peut résister à la tentation d’y entrer. Mais il est loin d’imaginer qu’un « arbre à l’envers » l’y attend et quelle aventure incroyable celui-ci va lui faire vivre.
J’ai ouvert une enveloppe, un peu distraite, en pensant à autre chose. Et un livre vert et rose a glissé dans mes mains. Je l’ai feuilleté et je suis tombée sur une illustration où la grand-mère tient sa petite-fille sur ses genoux. Ma fille était là et elle a ouvert de grands yeux. Je lui ai offert le livre et elle m’a demandé une dédicace. Pendant que j’écrivais, j’ai pensé à ce que cette histoire racontait. À mes parents. Aux leurs. À cette maison. À mes enfants. À mes frères. Mes nièces. À la vie et à la mort. Et une émotion est montée. Saudade…
Saudade de cette maison que mon père a bâti et aimé si fort, des meubles qu’il collectionnait, des armes sur les murs, des tableaux partout, saudade de ce jardin immense où je glissais du lait dans les gosiers affamés des oisillons qui nichaient dans les hortensias (je pensais à cette époque que le lait était bon pour TOUS les bébés), des eucalyptus qui se balançaient sur le lac, des chevaux, des chiens, du flamboyant où l’un de mes frères est tombé en glissant du toit alors que mon cœur de l’autre côté de l’Atlantique s’arrêtait de battre, de mon autre frère tenant mon fils riant aux éclats dans ses bras, des poissons qui écoutaient de la musique classique, de la bibliothèque de ma mère, de cette atmosphère de joie de vivre qu’elle créait partout où elle passait, du café de ma grand-mère… Et tant d’autres images, sons, parfums…
L’espace d’une dédicace, j’étais à nouveau là-bas. J’ai écrit ce texte quand j’ai su que la maison allait être vendue sans que je l’aie revue. Que c’était fini, je ne pourrais plus y retourner. Que ma fille n’en aurait aucun souvenir. Et qu’il ne m’en resterait que les miens. J’ai écrit ce texte pour que tout cela continue à vivre. Parce que je suis reconnaissante de tant de bonheur. Parce que le bonheur passé n’est jamais passé… Parce que ceux que nous avons aimés ne disparaissent pas. Grâce à votre lecture.
« Son cœur battait la chamade, ses mains transpiraient.Paulo oublia qu’il était grand. L’enfance, avec ses effrois et ses merveilles, l’enfance et ses urgences que ne conjugue que le présent était là. Le jeu. Il fut à nouveau un enfant en entier dans l’instant présent, un enfant pour qui jouer c’est sérieux, une question de vie ou de mort. »
« On peut changer – certains diraient “grandir” – en un clin d’œil, un battement de cils ou de cœur, une marche que l’on saute, une poignée que l’on baisse, une porte qui s’ouvre. De l’extérieur, on ne semble pas différent. dedans, rien n’est plus pareil. Paulo se sentait comme ça. Ailleurs. A côté. En voyage vers un lieu inconnu où tout est admirable parce que rien ne fonctionne comme on en a l’habitude. »
« La tristesse n’a pas besoin de faire du bruit pour faire mal. Les larmes coulaient sur leurs joues, sous les lunettes de soleil, et je me demandais si, à force, elles creuseraient un lit comme les ruisseaux. »
« Elisa ne racontait que des choses qui avaient réellement eu lieu. Elle disait qu’à son âge inventer donnait plus de travail que se souvenir. »
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« L’Arbre à l’envers est un livre aux entrées multiples. Avec des mots qui sont comme des images, Pauline nous emmène à la source de ses racines et de son histoire. Et on ne peut s’empêcher d’apercevoir derrière le questionnement de Paulo, l’ombre de la jeune Pauline. À la fois présente et détachée, l’auteure devient notre guide touristique, nous interpellant au fil du roman sur les nuances de langue portugaise, commentant les us et coutumes, la géographie, la faune et la flore du Brésil. Teinté d’humour et empreint d’une émotion palpable, ce livre aborde la question du deuil avec une poésie et une philosophie qui en fait un roman atypique, à la fois dans sa construction, mais aussi dans cette étrange manière de nous prendre par la main, pour un voyage intimiste au coeur de cette famille, touchée par le deuil du grand père dont l’ombre bienfaisante plane sur sa descendance. Mais si elle nous serre parfois le coeur, Pauline a la plume si douce, qu’elle se garde bien de sombrer dans le pathos. Bien au contraire, ce livre est un hymne à l’amour et à la vie, une bien jolie façon de parler de la mort et de la transmission aux enfants et une invitation à découvrir d’urgence le Brésil, et la bossa nova! »
« Ce roman court est un album souvenir, une boîte à trésors contenant de belles surprises. C’est un roman sur le thème de la naissance : naissance du petit frère, naissance de la cousine, naissance du sentiment d’appartenir à une famille, une lignée. C’est aussi un roman sur le thème du deuil, celui du grand-père, mais aussi de la prime enfance qu’on quitte avec quelques larmes, quelques gouttes de sang que le tomahawk fait couler pour un monde plus vaste, symbolisé par l’arbre, dans lequel Paulo trouve sa place. La petite cousine est aussi un personnage essentiel, Paulo plus jeune, fille d’une longue lignée elle aussi, que la grand-mère lui transmet dans la bibliothèque. Lieux symboliques, le bureau, la bibliothèque, lieux où le passé se mêle à l’imaginaire pour recréer des scènes merveilleuses : c’est Borges qui habite ici, c’est l’Aleph pour les petits! Ce conte métaphysique démontre que Pauline Alphen a passé un stade dans son écriture et elle peut s’amuser d’autant plus pour créer cet ouvrage sensible, aussi vif et chaleureux qu’un air de bossa nova. Intérêt pédagogique : Un roman qui mérite amplement d’être lu et étudié en sixième-cinquième, n’en déplaise aux ennuyeux préceptes qui séparent littérature patrimoniale et littérature contemporaine. »
« Sous la forme d’un conte, l’auteur propose une histoire douce, émouvante et pleine de poésie. Tout d’un coup, Paulo grandit. Une journée pour comprendre que rien ne sera plus jamais comme avant. Le lecteur est sensible à ce changement décrit avec beaucoup de tendresse et de réalisme. Comme Paulo, on est appelé à se souvenir de cette sensation étrange qui a suivi un évènement particulier; ce drôle de sentiment qui vous fait vous sentir un peu moins jeune et plus expérimenté, échappant lentement à un monde innocent, celui de l’enfance. L’auteur raconte l’extraordinaire découverte de ce jeune garçon dont l’apparence inchangée ne laisse rien entrevoir des métamorphoses intérieures, indélébiles et précieuses. Le récit aborde avec beaucoup de délicatesse et d’amour des thèmes durs, nécessaires mais aussi très beaux tels que la disparition, la transmission ou encore le souvenir. La nostalgie qui imprègne le texte cède bientôt avec bienveillance sa place à la naissance renforçant toujours plus les liens entre les générations. L’arbre à l’envers est bien plus qu’une invention d’écriture, il est une invitation à ne pas oublier combien les histoires de nos grands-parents sont inestimables. »